Le Canal de la Martinière dit "le Canal latéral à la Loire"
Les progrès techniques réalisés au XIXème siècle permettaient la construction de steamers (navire équipé de moteur à vapeur) jaugeant toujours plus lourd. Dans le même temps, la profondeur du chenal naturel de la Loire menant de l’estuaire vers le port de Nantes diminuait chaque jour un peu plus, du fait du dépôt continu de sables et de limons amenés par le courant. La question de la navigabilité de l’Estuaire devenait alors cruciale et préoccupante.
Les navires de haute mer avaient en effet les plus grandes difficultés à remonter jusqu’au port de Nantes, tandis que les bateaux construits dans les chantiers de l’île de Sainte-Anne avaient beaucoup de mal à rejoindre l’Océan.
Cette situation mettait en péril la survie du port de Nantes, ainsi, l’activité économique et industrielle de toute la ville.
C’est ainsi, qu’en 1876, un député de la Loire Inférieure criait à la tribune de l’assemblée : « La Loire s’ensable, la Loire se perd, la Loire se ruine ».
Les Ponts et Chaussées de l’époque n’avaient pas attendu l’appel du Député pour se préoccuper de cette question et tenter de remédier à ces difficultés de navigation. Déjà en 1859, des travaux d’endiguement du fleuve, depuis Bouguenais (44) jusqu’au Pellerin, avaient été entrepris.
Quelques années plus tard, grâce à l’intervention des élus du département, un vaste programme d’aménagement fut adopté. Il fut alors décidé le creusement d’un canal de navigation entre Paimboeuf et le Pellerin, parallèle au fleuve, permettant d’éviter le piège des îlots d’ensablement qui réduisaient les passages navigables à marée descendante.
Déclaré d’utilité publique en 1879, le canal maritime fut exécuté de 1882 à 1892. Ce canal dit « Canal latéral à la Loire » mesure 15 kilomètres. Il est établi entre le village de La Martinière, situé sur la commune du Pellerin, et l’extrémité Sud du bras du Carnet sur la commune de Saint Viaud.
Fermé en chacune de ses extrémités par une écluse à sas de 18 mètres d’ouverture libre et de 169 mètres de longueur totale, le canal permettait la navigation de grands navires jusqu’à 123 mètres de longueur.
Les ouvrages se sont poursuivis durant 10 années dans des conditions très éprouvantes ; le séjour de plus de 1 000 ouvriers dans des villages non préparés à cet afflux de population ne fut pas sans poser de graves problèmes d’hygiènes et de relation inter-communautaires. Les travaux furent extrêmement coûteux en sueur, en sang et même en vies humaines.
Le canal fut ouvert à la navigation le 1er septembre 1892. Il connût immédiatement un succès considérable…et mérité.
Alors que les bateaux ayant un tirant d’eau de plus de 3,5 mètres ne pouvaient plus remonter la Loire, voilà que grâce à cet ouvrage, il était désormais possible que les plus grands navires naviguent jusqu’au port de Nantes.
Les progrès de la technique étaient fulgurants à cette époque. Les chantiers construisaient des navires dont les tirants d’eau atteignaient 5,50 mètres, 6 mètres ou parfois même 7 mètres.
Dans le même temps, les dragues à vapeur devenaient très efficaces. En 1903, l’approfondissement du chenal naturel de la Loire fut décidé. En une décennie la cote -10 fut obtenue. Dès lors le canal était condamné.
En 1914, après environ 10 000 passages de navires entre 1892 et 1911, le Canal était fermé à la grande navigation.
Jusqu’à la seconde Guerre Mondiale, seuls les chalands des riverains, la batellerie et les navires des plaisanciers de passage fréquentèrent le canal et l’écluse de la Martinière.
Dans les années 60, le Canal reçu une nouvelle destination. Formidable réservoir d’eau douce, il sert, depuis lors, à réguler les niveaux d’eau des marais du Pays de Retz et à irriguer ¼ de son territoire.
Le Canal de la Martinière, y compris le canal de Buzay, rendu indépendant de celui-ci au moyen d’une écluse, l’étier de Vue et celui du Migron, tous ayant une jonction sur la rive gauche du Canal, assurent la drainage d’environ 8 000 hectares de marais qui, du fait de leur valeur herbagère, sont une des principales richesse de la rive Sud du fleuve.
Près d’un siècle après son creusement, le Canal maritime de la Basse Loire, abandonné des navires, est aujourd’hui un outil essentiel de régulation hydraulique du Pays de Retz. Il offre en outre, aux curieux de l’histoire, comme aux simples promeneurs, un plan d’eau et des ouvrages remarquables. Il est aussi un lieu privilégié pour les pêcheurs, ou de loisirs et de plaisirs pour tous ceux qui aiment s’adonner aux activités nautiques, ludiques ou sportives.
Les machineries à vapeur des écluses et les écluses elles-mêmes, situées sur le Canal, peuvent encore de nos jours être visitées ; au Carnet (commune de Saint Viaud) aux Champs Neufs et à la Martinière (commune du Pellerin).